Un récit de triathlète, par Florian Luquet

Florian Luquet nous résume ses deux dernières courses comme il sait si bien le faire : le triathlon de l'Alpe d'Huez taille M et la distance IronMan d'Embrun.

"Voilà le moment de rendre compte des deux dernières courses que j’ai vécues : la première, le triathlon M de l’Alpe d’Huez du 3 août dernier, et la seconde constituant l’objectif principal de la saison, le triathlon distance ironman d’Embrun du 15 août dernier.
5 jours après le dernier gros weekend de préparation pour l’épreuve d’Embrun, et 12 jours avant cette dernière j’ai pris le départ du triathlon M de l’Alpe d’Huez.
Un peu plus de 1000 concurrents m’ont accompagné pour l’occasion. Je sors assez loin de l’eau sans savoir trop où j’en suis car les filles sont parties 10 minutes avant les garçons et, pour la majorité, c’est largement suffisant pour qu’elles prennent le vélo avant moi. Depuis le lac (réserve d’eau EDF ouverte uniquement pour l’épreuve) nous avons une dizaine de km pour rejoindre le pied de l’alpe d’Huez. Sur cette section plate ouverte à la circulation je double plusieurs groupes de concurrents et concurrentes pendant que je m’applique à garder une marge dans l’intensité de mon effort car la course commence au bout de cette portion : Il s’agit de monter l’alpe d’Huez et ses 21 virages (le premier mythe du séjour) et de courir la boucle de 7km à 2 000m d’altitude.
Du bas du col et jusqu’en haut je remonte un à un les bons nageurs comme parsemés le long des lacets. Petit à petit et en voyant le nom des triathlètes que je dépose, je comprends que je suis dans un bon jour. Arrivé dans une des dernières rampes en entrant dans la station, Clémence est accompagnée de 3 bucherons miramontais remontés comme des pendules (malgré la gifle que leur avait filée le format Long de la veille !). Ils me gueulent littéralement dessus et m’annoncent que je tiens la 10ème place. Il va falloir assumer cette montée solide sur la partie course à pied.
A pied la boucle est difficile sur 4km avant de redescendre vers la ligne d’arrivée. Au 4ème km je suis 9ème et derrière il y a peu de chance que ça revienne. 500 mètres avant l’arrivée j’ai le 8ème à 10sec, poussé par les hurlements des miramontais, je me saigne (selon l’expression !) et termine à la 8ème place. A ce stade, c’est déjà ça de pris.
Le lendemain on quitte l’alpe d’Huez avec quelques traumatismes (dorsaux notamment) mais pas mal de confiance et beaucoup de plaisir en poche. Direction Serre Chevalier pour 10 jours d’entre deux, passés entre vacances et fin de préparation embrunnale.
La reconnaissance du parcours vélo par petites portions va vite mettre à mal la confiance volée à l’arrachée à l’alpe d’Huez. Le programme de la journée du 15 aout n’est comparable avec aucune épreuve que j’ai pu faire jusque-là. 3800m dans l’eau je vois à peu près ce que ça représente, un marathon après 180 km de vélo aussi. Mais un marathon après 5000m de dénivelé positif en vélo, c’est différent. (A Poitiers pour réussir à faire 5000m de dénivelé positif en une sortie, il faudrait faire une sortie de 400km pour qui connait bien le coin !). Ils ne sont pas nombreux ceux à qui j’ai annoncé que je prenais le départ dans l’espoir de terminer en moins de 11h. Une fois sur place, l’affaire apparait prétentieuse. Plus le 15 approche, plus le doute s’installe.
Le 15 au matin, réveil 3h15 pour mes parents qui ont traversé la France d’ouest en est pour venir me voir oeuvrer (Ou désoeuvré, on en saura plus en fin de journée.), pour Clémence et pour moi. A 5h on est sur le site de course, à 6h on prend le départ. Autour de 1 200 triathlètes fanatiques, excessifs ou dérangés suivent tant bien que mal les lumières des kayaks et bateaux à travers la nuit. Il y a déjà beaucoup de public au bord de l’eau.
Une première boucle en retenue puis une seconde plus appuyée, 55min après le départ je sors de l’eau autour de la 30ème place. On enlève les combi, on enfile les maillots de vélo lestés du poids des 1000 barres de céréales et des 500 gels énergétiques, et on monte sur les vélos.
En route pour 6h30 à 6h45 de vélo selon mes ambitions. Je fais une première heure appuyée et je me retrouve très vite dans les 20 premiers. A partir de là je décide de rester sage, de lever le pied, et de rester dans le tempo d’un espagnol et d’un australien. Leur attitude me surprend, ils échangent régulièrement, ils montent les bosses doucement, tout en souplesse, et relancent fort sur le plat et dans les descentes. Je les interroge, ils prévoient de faire le circuit vélo en 6h20 – 6h30, c’est un poil plus rapide que ce que je m’étais fixé, mais avec eux je suis facile alors tant que ce sera le cas je resterai là.

En haut du col de l’Izoard (le second mythe du séjour), après 100km de vélo je suis 10ème de l’embrunman, j’ai le temps d’échanger un peu avec la famille qui est venue m’encourager jusqu’en haut du col. Je les sens tous très enthousiastes alors que de mon côté je me demande uniquement à quel moment je vais dériver. J’entame la descente du col quelques dizaines de secondes avant mes deux camarades espagnols et australiens qui vont vite me reprendre et que je ne reverrai plus avant la course à pieds (ils ont dû me mettre 2 à 3 minutes en 20km de descente !). A partir de Briançon il reste 70 km et je vais me retrouver seul pendant 1h30. Si je ne vois plus personne devant, c’est aussi le cas derrière alors je m’efforce de positiver et je tente de maitriser au mieux mes allures en continuant à m’alimenter un maximum. Puis 30km avant de poser le vélo je retrouve du monde, j’ai notamment le plaisir de rouler quelques km avec Carrie Lester, la futur vainqueur de la course. Puis deux gars me rattrapent, l’un d’entre eux est Scot Defilipis, un des prétendants au top 5. Musculairement je commence à être un peu dans le dur mais me voir si bien accompagné à ce stade de la course me rassure. Je vais finir les 10 derniers km vélo à nouveau seul et à l’économie.
En arrivant au parc, je fais un rapide calcul : j’ai nagé 55min, j’ai roulé 6h25, avec 5min pour les deux transitions ça me laisse 3h35 pour courir le marathon si je veux passer sous les 11h. Normalement c’est assez sur ce format, mais je suis déjà bien entamé et je sens bien qu’au niveau digestif ça devient compliqué. Aussi le marathon comporte 400m de dénivelé positif soit une bosse de 2km à effectuer sur chacune des 3 boucles de 14km.

Place au marathon donc, lors des 10 premiers km je suis très bien, sur le plat je maintien une allure de 4’30 au km, je sens que je peux courir plus vite mais je préfère courir relâché et en garder encore un peu. Puis autour du 15ème km je vais commencer à subir une alternance de 10 à 15min pas bien, 10 à 15min bien. Et ce sera comme ça jusqu’à la fin, accompagné de troubles digestifs (deux pauses grosse commission dans les bois sur les 20 derniers km..). Sans exploser réellement, je maintien un petit 12.5kmh. Au début du 3ème tour je reprends mon copain espagnol qui marche dès le pied de la bosse en pensant que je ne le reverrai plus. Enfin, à 3km de l’arrivée je débranche et me remet à courir bien plus vite, autour de 15kmh. Malgré ça l’espagnol revient de nulle part et me dépose à 1km de l’arrivée. Je boucle le marathon en 3h27 et termine la course en 10h53min et 45 sec à plus d’une heure du premier, exténué, soulagé d’en avoir fini et très content d’avoir passé la barre des 11h, qui plus est à une 13ème place au scratch et devant ma famille !

 


Je sors très content de ce séjour alpestre qui constitue une première pour moi, mais à coup sûr pas une dernière.
Merci à Clémence pour les mille et un massages entre l’alpe d’huez et embrun et pour le soutien global à travers une saison déjà longue. Merci à la famille venue partager cette longue journée malgré la distance, merci à Foulées Poitiers pour les chaussures qui ont courues à la hauteur de mes espérances, et à Bouticycle Poitiers pour la paire de roues qui a roulé bien au-delà des mes ambitions. Merci au Miramont Triathlon et à tous ceux qui m’ont suivi et soutenu pendant la course. Et une nouvelle fois merci à Nico Pizzol pour la justesse de la préparation.
A bientôt.
Florian"

 

Fl